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20/05/2018

La Troussepinette

   Une note alcoolisée que m'a inspirée Jacquote il y a bien longtemps alors qu'elle évoquait un apéritif vendéen, la Troussepinette !
Si le nom fait sourire, il est resté enfoui dans ma mémoire jusqu'à dimanche dernier où j'ai parcouru un bref trajet pour changer de département et me rendre en Lozère.

Une association de bergers nous attendait pour causer Biodiversité et Pastoralisme.
Comme il faisait un froid de canard à l'heure de l'apéro, voici ce qu'un berger a sorti de sa musette :
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La photo est mauvaise mais l'étiquette annonce "Apéritif d’Épine Noire". Aussitôt, je repensais à la boisson "de" Jacquote réalisée à base de prunellier sauvage, nommé localement "l'épine noire".

L'apéritif -lui- s'appelle Troussepinette en Vendée, Charente-Maritime, Poitou et Berry mais aussi simplement "Épine noire" dans d'autres régions.
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Je pense que tout le monde connaît cet embrouillamini d'épines longues et acérées, porteuses en automne de baies rondes et bleues.
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Il s'agit du Prunus Spinosa, ici tel qu'il est visible en automne.
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Et le voici de mai à juin (suivant les régions et le climat), formant des bosquets ou des haies enneigées par des milliers de petites fleurs blanches dont les abeilles raffolent.

Le printemps est la saison idéale pour le repérer car on voit de très loin ses branches échevelées, désordonnées et immaculées.

Cette note sera inachevée puisqu'elle ne comporte pas la dernière étape : La mise en bouteille du liquide.
Je la poste simplement pour que les lectrices-promeneuses-cueilleuses puissent REPÉRER les buissons.

Attention : Le pollen des fleurs est un capteur inégalable de particules fines, il est quasi magnétique ; donc, évitez de sélectionner des prunelliers (et toute autre fleur) en bordure de route.

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Pour l'anecdote, chaque année je fais ce repérage parce que je voudrais AUSSI fabriquer une boisson avec les prunelles bleues mises à fermenter. Il s'agit d'une autre recette, très différente de la Troussepinette.

Il faut attendre les premières gelées afin que les prunelles soient blettes et donc moins acres.

Seulement voilà, je ne suis pas la seule a attendre (photo ci-dessus)..... les billes bleues ont des fans aussi nombreux que goulus !
Et celles qui tombent au sol sont vite emportées par les rongeurs et les renards qui en font des réserves caloriques pour la période hivernale.
Donc, quand je ramène ma fraise vers les prunelliers, ils sont vides, il n'y a plus que bois et épines menaçantes et je rate encore ma vinification !!!
Enfin bref, faut bien que tout le monde mange...
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Ci-dessus, une bouteille de Troussepinette vendéenne.

En vérité, à l'origine, on disait "trousse-épinette" ou "pousse-épinette" pour une raison majeure : Ce sont les jeunes pousses (rameaux) du prunellier qui servent à l'élaboration de l'apéritif, rameaux qui poussent au-delà des redoutables épines et qui -eux- en sont dépourvus.

A l'époque, j'avais cherché sur le web une recette de Troussepinette qui soit limpide. Hélas, je n'avais trouvé que de vagues récits imprécis, jetés comme ça tout à trac.
Mais dimanche, j'avais face à moi un pro de la Troussepinette, une vraie chance, car selon lui "cet apéritif est un patrimoine générationnel qui se respecte, se transmet et se boit obligatoirement dans un verre de cantine, le modeste Duralex des familles !!"
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Comme tout fruitier (sauvage ou pas) il met les fleurs avant les feuilles.

La floraison déclenche la montée en sève, et justement, c'est cette fameuse sève qui est précieuse pour la Troussepinette !
Lorsque les fleurs tombent, des bourgeons éclatent, libérant très rapidement un nouveau feuillage vert clair.
Voilà la période précise qu'il ne faut pas rater et comme les oiseaux ne mangent pas les feuilles, tous les espoirs sont permis !

Chez moi, la transformation s'est effectuée très vite ; presque du jour au lendemain, les feuilles sont apparues.
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Voilà la "cueillette"...
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... et voilà les rameaux hachés qui font trempette !

Les ingrédients de la Troussepinette pour 1 litre final :
- 1 bouteille de vin au choix (blanc, rosé ou rouge) titrant au moins 12,5°
- 20 cl d'alcool pour fruits ou alcool neutre (Vodka, Gin)
- 100 g de sucre maximum, après test, on peut baisser à 50 g ; de toutes façons, vaut mieux en rajouter si besoin car en retirer est impossible ^^
- 70 g de jeunes pousses de prunellier (les bouts des nouvelles branches) souples, sans épines et vert clair, hachées grossièrement. L'aide des ciseaux suffit, il n'y a pas de bois.

La recette :
- Chauffer (juste un peu) un verre de vin afin d'y dissoudre le sucre.
- Dans un grand bocal à couvercle, mélanger tous les ingrédients, remuer, boucher.
- Agiter chaque jour avec une pique en bois.
- Au bout de 8 jours, prélever une cuillerée de liquide et le goûter : Si le parfum d'amande amère est flagrant, c'est parfait, filtrer et mettre en bouteille qui restera au frigo pour l'apéro !
- Attention, d'un goût très agréable à une forte amertume il n'y a parfois qu'un jour d'écart. Donc on taste chaque jour après une semaine de macération.
A NOTER : La macération peut durer jusqu'à 3 semaines, cela dépend de l'âge des pousses : Plus elles sont jeunes et plus la sève se répandra vite dans le liquide.

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Un mot sur la saveur :

Dire que j'ai été séduite, le mot est faible... Dans ma tête ce fut cash JE DOIS EN FAIRE !
Le goût hésite entre cerise noire et amande amère, j'ai tout bonnement adoré.

Divine Troussepinette (merci Jacquote d'en avoir parlé un jour), je posterai la photo finale bientôt...
Et si vous voulez en faire 5 litres d'un coup, dites-le moi, je donnerai les proportions pour ce volume.